Réaction de Nicolas Dupont-Aignan à l’intervention de Nicolas Sarkozy
Du « Tout est possible » au « Rien est possible »
L’histoire est parfois pleine d’ironie. En 4 ans Nicolas Sarkozy, celui-là même qui était le candidat du « Tout est possible » est devenu le Président du « Rien est possible ». Ce soir, aux yeux de tous les Français, le candidat du volontarisme politique est devenu le président du renoncement.
Il a capitulé face à l’Allemagne dont il a fait le modèle absolu, alors que nos économies et nos modèles sociaux sont différents. Dès lors, il n’a fait que confirmer que ce n’était plus le couple franco-allemand qui était la locomotive de l’Europe mais l’Allemagne seule qui en était le maître.
Il a capitulé face à la Chine. Après avoir mis un pied en Europe par la Grèce il y a un an, elle étend maintenant ses tentacules sur tout le continent. Comment peut-il laisser faire ça alors que ce pays ne respecte aucune norme sociale et environnementale ? Comment peut-il laisser faire ça alors que ce pays utilise sa monnaie comme une arme économique et maintenant politique ?
Il a capitulé face aux banques. Il dit vouloir les contrôler comme il l’avait dit il y a deux ans au moment de leur renflouement grâce aux impôts des Français. Mais comme il y a deux ans il ne s’en donne pas les moyens.
Enfin il a définitivement capitulé face à la désindustrialisation du pays qui est la vraie cause des déficits et de la dette. Il préfère sauver un euro qui asphyxie nos entreprises plutôt que préparer l’avenir en allégeant les charges sur les PME et en protégeant notre économie d’une concurrence déloyale.
En réalité Nicolas Sarkozy a rejoint le camp des déclinistes. Le bateau coule et le capitaine nous promet une mort lente. Il s’en enorgueillit même au point d’en faire son axe de campagne pour 2012.
Accord européen : l’incendie est circonscrit mais le feu continue !
par Rama Yade
L’accord européen d’hier soir a été un grand pas. Réduction de 100 Mds de la dette grecque, recapitalisation des banques, relèvement à 1000 Mds des dotations du Fonds européen de soutien, création d’un fonds spécial accueillant les contributions des pays émergents, poursuite du soutien de la BCE à l’Italie et à l’Espagne.
A l’occasion de ce sommet de la dernière chance, on a évité le pire. Quelque chose en est sortie. Ce fut un accord au forceps mais accord quand même, ce qui n’est pas rien vu l’ampleur des désaccords initiaux. L’euphorie boursière qui a, aujourd’hui, salué cet accord, marque le retour (temporaire ?) de la confiance.
Mais, s’il a le mérite d’exister, cet accord n’est qu’une étape. Il est donc fragile.
Nul ne peut assurer que la Grèce soit tirée d’affaire. Concernant le Fonds européen de soutien, on est loin des 2000 Mds évoqués ces dernières semaines à Bruxelles pour dissuader les marchés d’attaquer l’Italie. Les Européens en sont donc réduits à faire la tournée des pays émergents et du FMI pour trouver des fonds supplémentaires.
Surtout, les questions que soulève cet accord sont essentiellement politiques.
Quelle étrange et spectaculaire prise en main politique du destin de l’Europe par la Chine ! Comment après ça lui demander de se plier aux normes sociales et environnementales? Cette porte ouverte, nouvelle, qui lui est offerte, n’est pas neutre pour l’avenir. On aurait voulu une Europe plus indépendante face à la Chine.
De surcroît, avec l’air de ne pas y toucher, on a avancé, vers le fédéralisme. Mais sans les peuples. Entré par effraction, avec des conséquences potentiellement lourdes sur un plan politique, ce fédéralisme se traduit par l’obligation désormais faite aux pays les plus déficitaires de laisser leur budget être examiné par les instances européennes «avant leur adoption par le Parlement national concerné ». La Commission européenne devra aussi surveiller l’exécution du budget et proposer si nécessaire des corrections en cours d’année.
Enfin, il faudra bien un jour qu’on fasse sauter le nœud gordien de l’Europe et que résume cette question encore irrésolue : comment répondre à une crise de surendettement et de compétitivité sans recourir à la dévaluation de la monnaie ?
Et alors, seulement, après, nous pourrons enfin reparler de ce qui doit être l’horizon de l’Europe : la croissance.
L’indépendance de la France « en rien mise en cause » par une participation de la Chine au FESF, selon Sarkozy
PARIS (AP) — « Il faut que la Chine engage davantage de moyens pour relancer l’économie mondiale », a plaidé jeudi soir le président français Nicolas Sarkozy.
« Si les Chinois, qui ont – si mon souvenir est exact – 60% des réserves mondiales, décident de les investir dans l’euro plutôt que dans le dollar, pourquoi le refuser? Y a rien à négocier! » a-t-il affirmé lors de son interview télévisée sur TF1 et France-2.
« Notre indépendance ne sera en rien mise en cause par cela », a promis le chef de l’Etat. « Pourquoi on n’accepterait pas que les Chinois fassent confiance à la zone euro et déposent une partie de leurs excédents dans notre Fonds (européen de stabilité financière, NDLR) ou dans nos banques? », s’est-il interrogé.
Le directeur du FESF, Klaus Regling, doit se rendre à Pékin vendredi pour discuter d’une participation chinoise.
Nicolas Sarkozy a salué dans la Chine « un immense partenaire ». A une semaine du G-20 de Cannes, il a expliqué que l’un des enjeux de ce sommet était de faire comprendre aux Chinois que « la question de leur monnaie et de l’intégration de leur monnaie dans le système monétaire est incontournable, absolument incontournable ».
Réactions de Fabius et Moscovici à l’interview télévisée de Sarkozy
L’ancien Premier ministre PS Laurent Fabius a vu vendredi sur France Inter dans l’émission télévisée du président Nicolas Sarkozy la veille, un exercice » « de défausse » et même de « dédoublement ».
« L’essentiel était consacré à une défausse », a analysé le député de Seine-maritime: « au fond, toute la situation difficile que nous connaissons est due à la crise, aux prédécesseurs socialistes et aux successeurs socialistes, jamais à lui-même ».
Le chef de l’Etat aurait « au moins pu reconnaître la réalité : quand il est arrivé aux responsabilités, la dette était moitié moindre qu’aujourd’hui, le record du chômage est crevé, le déficit commercial n’a jamais été aussi fort », selon M. Fabius.
C’était même à ses yeux un « exercice de dédoublement, avec d’un côté le M. Sarkozy qui analyse et de l’autre, un président qui est là mais n’est responsable de rien ».
Pour l’ancien ministre socialiste de l’Economie, la dégradation des comptes publics est due certes en partie à la crise mais « une part prépondérante est due à la politique gouvernementale, en particulier une politique de cadeaux fiscaux totalement inconsidérée ». « Quand les socialistes ont quitté le pouvoir, la dette était inférieure à 60% du PIB. Il va finir son quinquennat à près de 90% », a prédit M. Fabius.
Le député Pierre Moscovici (PS) a pour sa part jugé vendredi que Nicolas Sarkozy, président « à bout de souffle », s’était livré la veille à la télévision à un exercice de « défausse et d’irresponsabilité ». « J’ai vu un président à bout de souffle, qui essayait de se transformer en candidat protecteur », a déclaré sur RTL le responsable socialiste qui a dirigé la campagne de primaire de François Hollande.
Jugeant que dans le couple franco-allemand, le chef de l’Etat français était devenu « un partenaire junior » et que « c’est Angela Merkel qui mène la danse », l’ancien ministre des Affaires européennes « partage l’idée qu’il faut être à parité avec les Allemands ».
Mais « je me souviens qu’il y a dix ans », a poursuivi M. Moscovici, « notre commerce extérieur n’était pas dans les déficits abyssaux d’aujourd’hui, nos comptes publics étaient dans une situation bien meilleure, notre coût du travail était plus faible que celui de l’Allemagne et notre croissance plus forte ».
Donc en s’attaquant aux 35H ou à la retraite à 60 ans, mesures socialistes, M. Sarkozy se livre « à une exercice de défausse et d’irresponsabilité incroyables », a jugé le député PS.
L’argumentation sarkozyste « a été : +c’est la faute des autres+ », a poursuivi l’élu du Doubs. Or « depuis qu’il est président, 500 milliards d’euros de dette publique en plus, un quart de la dette publique française en 4 ans et demi! 50 milliards d’euros qui pèsent sur les couches moyennes et populaires en plus, pour celui qui proposait de baisser les prélèvements obligatoires! », a poursuivi M. Moscovici.
Enfin il a estimé que le président de la République avait tenu sur les fonctionnaires des propos « désagréables, » voire « insultants ».
Sarkozy à la TV: « aller plus loin » (Villepin)
Dominique de Villepin (République solidaire) s’est félicité, au lendemain de l’intervention de Nicolas Sarkozy, d’une « prise de conscience, même tardive » de l’ampleur de la crise, mais a jugé qu’il fallait « aller plus loin » et porter plus attention à la « justice ».
« Il y a une prise de conscience et je m’en réjouis », a admis l’ancien Premier ministre sur i-Télé, tout en soulignant qu’elle était « tardive et insuffisante ». « Il faut plus de rigueur », a-t-il exhorté, « il faut aller jusqu’au bout de l’exigence d’assainissement de notre pays ». Ensuite, au yeux du fondateur de République solidaire, il faut de la « justice. Elle est un peu absente ». « Je souhaite pour ma part que la contribution des plus aisés soit plus forte »: porter de 41 à 45% la tranche supérieure de l’impôt sur le revenu, créer une nouvelle tranche à 50%, avec aussi « un impôt exceptionnel sur les sociétés ». « Il faut des réformes structurelles, en profondeur », « j’appelle à une véritable refondation politique, économique et sociale », indique-t-il encore.
La convergence vers l’Allemagne, est, à ses yeux, « un alignement ». Or il faut « trouver un juste équilibre entre plus de rigueur nécessaire et plus de relance, plus d’investissement, plus de compétitivité ». Il a défendu son projet de TVA « EEE » prenant « en compte nos exportations, notre emploi, notre environnement », et qui pénaliserait « un certain nombre de produits importés qui jouent sur le dumping social et fiscal ». Dominique de Villepin veut aussi un « service public bancaire » avec imposition d’obligations de service public aux banques, alors qu’on a été « beaucoup trop laxistes » ces dernières années.
Jean-Pierre Chevènement : Nicolas Sarkozy veut mettre l’Europe toute entière à la diète
L’érosion de l’appareil productif français, insuffisamment soulignée d’ailleurs, n’est rapportée qu’aux réformes sociales de la gauche depuis 1981 mais jamais à la sur-évaluation de 50% de l’euro depuis 2005. Le chef de l’Etat évoque la crise de l’euro sans évoquer la politique de change. Il évacue le rôle de la BCE alors que ses propositions sur ce sujet ont été repoussées par Mme Merkel. M. Sarkozy ne parle que de converger avec l’Allemagne, ou d’intégration renforcée, pour mettre l’Europe toute entière à la diète.
Nicolas Sarkozy à la télé : la dette ! la dette ! la dette !
Le président de la République a fait de l’endettement l’unique problème du pays. Une véritable conversion qui renie le discours de Toulon qui rejetait la responsabilité de la crise sur la finance. Ne reste qu’une politique économique pour le pays: faire comme l’Allemagne…
Le général De Gaulle avait eu un trait d’humour à propos des hommes politiques qui « sautaient comme des cabris en criant : l’Europe ! l’Europe ! l’Europe ! » Son lointain successeur, Nicolas Sarkozy a choisi ce soir de sauter comme un sanglier devant les téléspectateurs en criant : « la dette ! La dette ! La dette ! »
Car c’était bien là le message principal que voulait faire passer le président de la République, de retour de Bruxelles, après un marathon de négociation pour un plan de sauvetage de l’euro et de la Grèce: la dette est devenu le souci principal de l’Elysée. De ce point de vue, même si ce virage politique est engagé depuis plusieurs mois, il est néanmoins spectaculaire.
Le tableau des risques encourus par la France, brossé par Nicolas Sarkozy, est absolument catastrophiste : du fait de la dette publique, les Français risquent rien moins que le sort des Grecs, Espagnols, Portugais ou Irlandais : la baisse des salaires, des pensions de retraites, la destruction du modèle social, la mort de la sécurité sociale, etc… « Nous sommes au bord du gouffre », a-t-il insisté.
L’obsession du déficit ne fait pas partie au départ de l’ADN politique de Nicolas Sarkozy. On peut même dire qu’il y est hostile par nature. En 1993, il avait creusé le déficit budgétaire et engouffré les milliards de francs des privatisations pour assurer, sans succès, la réélection d’Edouard Balladur. Idem en 2007, lorsqu’il se fait élire avec un programme de baisse d’impôts de plus de 11 milliards par an.
Une séquence fait comprendre le cheminement idéologique profond de Nicolas Sarkozy : questionné par Yves Calvi à propos du pouvoir des agences de notation qui menacent le triple A de la France, il répond : « Ce qui donne du pouvoir aux agences de notation, c’est la dette ». A ce moment là, Nicolas Sarkozy prend le contrepied de son discours de Toulon (rédigé par Henri Guaino) qui fait des agences et des pratiques amorales de la finance les seules responsables de la crise économique qui vient de s’abattre sur le Monde.
Il s’agit bel et bien d’une conversion. Selon un de ses proches, elle ne serait pas feinte. Le président de la République serait frappé par la puissance de la récession qui s’approche, et aurait conscience que cette fois-ci, la France n’a aucun moyen de la combattre par une politique de relance. D’où son mouvement de rapprochement avec Angela Merkel, qui professait, dimanche à Bruxelles, que « la crise n’est pas monétaire, c’est une crise de l’endettement ».
Ce n’est pas dans ces colonnes qu’on niera l’importance de la dette publique de la France (85% du PIB), son coût (48 milliards d’euros par an) et la nécessité de la combattre pour ne pas tomber sous la coupe des marchés financiers. Mais la dette est soudainement devenue dans le discours sarkoziste l’alpha et l’omega de la politique française. Cela lui permet de chercher des responsables : Mitterrand et la retraite à 60 ans, Jospin et les 35 heures, Chirac avec l’entrée de la Grèce dans l’euro en 2001…
La dette permet par ailleurs de justifier la réforme la plus impopulaire de son quinquennat, celle des retraites. Et le président s’arête sur l’obstacle : que fera-t-il pour la réduire ? Il annonce un effort d’économies de « 6 à 8 milliards d’euros supplémentaires » par rapport au budget 2012 qui vient juste d’être voté à l’Assemblée nationale. Pour les mesures, dont on devine qu’elles devraient tourner principalement autour d’un taux de TVA intermédiaire et / ou d’un taux d’impôt sur les sociétés exceptionnel, il faudra attendre pour le savoir son retour du G20 qui se tiendra à Cannes les 4 et 5 novembre. Comme si les discours convenus des grands du monde avaient une importance pour déterminer les mesures fiscales urgentes de la France.
L’obsession de la dette a une autre conséquence : le président de la République ne conçoit plus d’autre politique économique que dans l’association, voire l’imitation la plus étroite, de l’Allemagne d’Angela Merkel. Il rêve même d’un « domaine franco-allemand » (pour un président qui dispose d’un domaine « réservé », l’expression est surprenante), qui comprendrait la définition de l’impôt sur les société, l’unification des taux de TVA, la définition des hypothèses budgétaire, la fiscalité sur la patrimoine….
Quant à la justice sociale, à « l’équité », elle risque d’avoir un fort vilain visage, puisqu’il résume son programme à « moins d’assistanat, et plus d’investissement, voici la martingale gagnante dans tous les pays ». Les pauvres ont quelques soucis à se faire. La dette, avec Sarkozy, ils auront à en payer plus que leur part.
Hervé Nathan – Marianne